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code EAN :
9782351221495


Parution : 05/11/2015
Format 14x21
192 pages
17 euros

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La culture spectacle
Europe, Moyen Âge - XXe siècle

Marc Signorile

Instrumentalisés plus ou moins ouvertement par un pouvoir politique devenu commanditaire, la culture et l’art entrent dans une démarche utilitariste et produisent alors des effets pervers. Le spectaculaire, qui correspond à une utilisation politique de l’art envisagée dans une logique de domination et de rationalisation adaptée à un environnement historique, mystifie souvent le récepteur.
Cette logique est présente à toutes les époques, même si le contexte historique qui s’étend de la Révolution à la fin de la Seconde Guerre mondiale autorise des mises en perspective plus nettes.
Dans ce contexte, l’opéra, qui réunit les arts dans une expression synthétique, a été, en sa qualité d’art de l’extraordinaire, rapidement investi d’une fonction de propagateur d’idées. De la tragédie lyrique au drame wagnérien, finalité politique et stratégie spectaculaire sont généralement pensées conjointement, soulignant les enjeux idéologiques de l’œuvre.
Si, ainsi que le souligne Guy Debord, le spectacle déversé par les médias est la principale caractéristique de la société contemporaine, cet essai nous montre que cette situation s’appuie sur des pratiques très anciennes.

Docteur habilité en Lettres et Sciences humaines, Marc Signorile a été chercheur au CNRS et a enseigné à l’université d’Aix-Marseille. Musicologue et sociologue de l’art, il a produit de nombreux ouvrages et articles consacrés au sens à donner aux phénomènes de création et à l’œuvre. Il collabore également à des corpus de référence internationaux. En 2012, il a publié aux éditions Sulliver Art et propagande, dont ce nouvel ouvrage prolonge et amplifie le propos. Il a récemment participé à La République des lettres dans le midi rhodanien (éd. Daniel Roche, Privat, 2014).

Presse :

Ce qu’on entend par culture n’est jamais très clair. Surtout quand la politique s’en mêle. Marc Signorile définit donc son sujet, celui de la culture et celui du spectacle, pour nous entretenir de la manière dont ils interfèrent lorsqu’ils sont au service du pouvoir. Du Moyen Age au XXe siècle, ce sociologue de l’art et musicologue nous invite à réfléchir sur la manière dont le pouvoir s’est exercé au travers de la musique.
Un genre réunit ce concept de culture et de spectacle : l’opéra. Héritage du Moyen Age, mais sans doute aussi de la Grèce antique, ce n’est pas un genre populaire, mais un genre sur lequel le pouvoir a compté, au moins jusqu’à la fin du XIXe siècle, pour conforter sa vision du monde.
Dans cette chronique des œuvres qui ont joué ce rôle, Marc Signorile examine le répertoire aux ordres sous l’Empire, les opéras de Rossini sous la Restauration, puis ceux de Wagner. Il explique par exemple comment le
Robert le Diable de Meyerbeer devint un spectacle éminemment politique sous la monarchie de Juillet.
Après la défaite de 1870, la musique s’impose plus que jamais comme un enjeu pour les républicains et les nationalistes. Le public est alors pris dans une guerre culturelle et idéologique qui a peu à voir avec l’esthétique. Aujourd’hui, l’opéra n’est plus ce lieu prédominant. Mais l’Etat continue de manifester ses préférences par des subventions qui ne sont pas seulement toujours guidées par des considérations artistiques. Dans son exploration érudite et limpide, sur les traces de Debord et de Bourdieu, Marc Signorile nous invite à réfléchir à tout cela. Ce n’est pas le moindre mérite de cet essai aussi discret que profond.

Laurent Lemire - Livres Hebdo
 

Extrait :

Guy Debord a abondamment utilisé la notion de spectacle, qu’il confond volontiers et à dessein avec le spectaculaire, pour placer en abyme l’altérité supposée perdue de l’homme, face à une société de consommation qui dominerait et asservirait les masses par le biais du divertissement et des médias. Si la théorie de Debord nous fournit des clefs pertinentes pour l’analyse critique de l’époque contemporaine, elle reste malgré tout réductrice au regard de l’histoire. Car les dispositifs du spectaculaire mis en évidence par Giorgio Agamben, pour lequel «le dispositif est toujours inscrit dans un jeu de pouvoir»  puisqu’il possède «la capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler, de contrôler et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants», semblent exister depuis la nuit des temps. Les trois dimensions qui fondent le dispositif, soit la dimension technique qui concerne l’installation de l’objet spectaculaire, la dimension pragmatique qui invite à prendre en compte le contexte communicationnel dans lequel le dispositif s’inscrit, et la dimension politique constituée par le message, son effet et l’impression qu’il suscite, se lisent continûment dans l’histoire sitôt que les pouvoirs politiques souhaitent persuader, infléchir, asservir, contraindre leurs sujets, en utilisant les méthodes propagandistes .
 
Le spectacle constitue évidemment un moment clef de la vie de la société qui le produit et pour laquelle il est produit. Il fusionne les différentes expressions du geste artistique dans le but de générer une expérience multi-sensorielle dans un espace-temps singulier. À ce titre, ce haut lieu symbolique constitue un terrain privilégié pour saisir et comprendre la culture dont il émane, et dont il met en évidence les représentations et les imaginaires. Il importe d’en décrypter le message politique en utilisant les sources textuelles et iconographiques qui permettent la reconstitution inévitablement idéalisée et l’interprétation de ces moments évanescents. La prise en considération de l’appareil décoratif, qui encadre le discours spectaculaire et qui est conçu pour métamorphoser un espace préexistant, est d’une grande importance dans la mesure où le décor produit sur le spectateur un effet qui peut influer sur son jugement. Le spectacle est donc une notion lourdement chargée de sens, qui se pose comme le lieu d’enjeux artistiques et idéologiques conditionnant le point de vue de la réception, paramètre déterminant dans le cadre d’une visée politique. En effet, si l’œuvre à l’origine du spectacle constitue une trace fixe, sa représentation est par nature éphémère. D’où l’importance du ressenti de chaque destinataire, qui recrée inlassablement le sens de l’œuvre en fonction de son propre horizon d’attente constitué d’éléments culturels mais aussi politiques. Ce phénomène complexe octroie à l’œuvre une véritable fonction sociale continuellement réactualisée .
 

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