Nous-mêmes, les poètes, avons rendu les armes depuis des décennies. Nous-mêmes avons abandonné le terrain de manœuvres à la bêtise.
La bêtise que nous avons bêtement sous-estimée! La bêtise qui sut si intelligemment retourner les mots pour s’en faire des alliés!
Des agents doubles dévoués, qui ont patiemment miné le langage de l’intérieur: prônant les vertus de la justice et de la probité, et dans le même discours les assassinant; du sens commun magnifiant démesurément l’adjectif, et vidant à grands seaux le substantif de sa substance, de mots d’ordre tonitruants en lénifiants commentaires, de soporifiques fictions en documentaires tronqués.
André Bonmort, La guérilla des poètes